SEANCE D’INFORMATION ET DE SENSIBILISATION DES ARTISTES PHOTOGRAPHES DU BENIN SUR LE RESPECT DES DONNEES PERSONNELLES ET DE LA VIE PRIVEE
INTRODUCTION
La protection des données personnelles et de la vie privée est devenue de nos jours un enjeu majeur face au développement sans cesse croissant et multiforme des infractions aussi bien de droit commun que celles liées au numérique.
Lorsqu’il en fait une activité qui lui procure des revenus, le photographe/vidéaste, qu’il soit amateur ou professionnel, ambulant ou possédant un studio traite des données personnelles et est susceptible de faire des intrusions dans la vie privée des personnes.
Dès lors, il importe non seulement qu’il maitrise l’art et les techniques de son métier, mais aussi et surtout qu’il ait une idée assez claire des dispositions législatives et règlementaires qui encadrent son exercice surtout, en ce qui concerne la protection des données personnelles et de la vie privée et les sanctions auxquelles il s’expose en cas d’infraction.
I – L’artiste photographe/vidéaste et les données personnelles
i -l’exercice du métier d’artiste photographe/vidéaste au Bénin
Il existe au Bénin une Fédération des Artistes Photographes/vidéastes et plusieurs associations de ce corps de métier.
Il est cependant incontestable que de nombreux amateurs sans affiliation à une organisation professionnelle et sans formation préalable exercent à plein temps ou à temps partiel le métier de photographe/vidéaste.
Invités ou non, ils « débarquent « à toutes les manifestations, ateliers, forums et autres lieux où de regroupement de personnes et prennent des photos, parfois des vidéos qu’ils proposent séance tenante à l’achat aux personnes photographiées ou filmées.
ii – Définition des données personnelles et de la vie privée
Une donnée personnelle est toute information se rapportant à une personne physique identifiée directement par ses noms et prénoms.
La personne physique peut également être identifiée indirectement par son numéro de téléphone, la plaque d’immatriculation de son véhicule, sa voix, son l’image. etc.
Le photographe/vidéaste professionnels ayant ou non des banques de photographies et site internet sont concernés mais aussi les photographes/vidéaste de mariage, de sport ou d’événements également parce qu’ils capturent et stockent des données personnelles. En effet chaque image reconnaissable d’une personne est une donnée, même si cette personne est en arrière-plan de l’image. Si vous photographiez un mariage, un événement ou si vous prenez des photos dans la rue, vous collectez des données personnelles sans le savoir.
Quant à la vie privée, elle est la sphère d’intimité qui a vocation à rester à
l’abri des regards d’autrui. Grossomodo, elle recouvre trois dimensions principales que sont le secret, la quiétude et l’autonomie.
Pour permettre à chaque participant ici présent d’appréhender l’importance des présents échanges, deux autres notions méritent d’être clarifiées. Il s’agit des notions de traitements et de responsables de traitements.
Le code du numérique définit comme traitement : « toute opération ou ensemble d’opérations effectuées ou non à l’aide de procédés automatisés ou non, et appliquées à des données ou des ensembles de données à caractère personnel, telles que la collecte, l’exploitation, l’enregistrement, l’organisation, la structuration, la conservation, l’adaptation, la modification, l’extraction, la sauvegarde, la copie, la consultation, l’utilisation, la communication par transmission, la diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou l’interconnexion, ainsi que la limitation, le cryptage, l’effacement ou la destruction ».
Quant au Responsable de traitement, il est défini comme étant : « : toute personne physique ou morale, l’autorité publique, le service ou tout autre organisme ou association qui, seul ou conjointement avec d’autres, prend la décision de collecter et de traiter des données à caractère personnel et en détermine les finalités et les moyens ».
De ce qui précède on peut retenir trois idées essentielles :
- l’image d’une personne physique est une donnée personnelle lorsque la personne est identifiée ou identifiable;
- la prise et/ou la publication de l’image d’une personne physique identifiée ou identifiable avec ou sans métadonnées (date, évent. lieu, etc.) constitue un traitement de données personnelles ;
» La prise et l’enregistrement d’une photo numérique représentent un traitement de données à caractère personnel ».
- l’artiste photographe/vidéaste, quel que soit son statut, est un responsable de traitement, à tout le moins, il fait partie de la chaîne de traitement des données personnelles lorsque cette activité lui assure un revenu.
II – Distinction régimes données personnelles et droit à l’image
Il faut bien distinguer la protection des données personnelles du « droit à l’image ».
Le droit à l’image est un droit de la personnalité qui permet à toute personne, dans certaines circonstances de s’opposer à l’utilisation de son image sans son autorisation. Le droit à l’image est protégé en se référant au Code Civil.
Mais si en matière de droit à l’image, le consentement tacite est admis pour la capture de l’image, ceci n’est pas le cas en matière de protection des données personnelles.
III – Aperçu général des principes de la protection des données personnelles
1 – Les principes cardinaux
i – Principe du consentement et de légitimité (cf art. 389/390)
En vertu de ce principe, le traitement des données à caractère personnel est considéré comme légitime si la personne concernée donne au préalable son consentement.
Dérogation : toutefois, il peut être dérogé à cette exigence du consentement dans certaines conditions prévues par la loi : respect d’une obligation légale du responsable de traitement – exécution d’une mission d’intérêt public dont est investi le responsable du traitement ou le tiers auquel les données sont communiquées – sauvegarde de l’intérêt ou des droits fondamentaux ou de l’intimité de la vie privée physique concernée, etc.
j – Principe de licéité et de loyauté du traitement des données à caractère personnel (cf art.383)
Le traitement des données à caractère personnel doit se faire de manière licite, loyale et non frauduleuse. Cela suppose un devoir de transparence que doit observer le responsable de traitement à l’égard des personnes concernées par le traitement des données personnelles.
k – Principe de la finalité (cf art. 383.3)
Les données à caractère personnel doivent être collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes et ne doivent pas être traitées ultérieurement de manière incompatible avec ces finalités.
l – Principe de la proportionnalité (cf art. 383.4)
Ce principe de proportionnalité implique que les données collectées dans le cadre d’un traitement doivent être adéquates, pertinentes et non excessives au regard des finalités pour lesquelles elles sont collectées et traitées.
m – Principe de la conservation limitée des données personnelles (cf art. 383.6)
Selon ce principe, les informations ne peuvent être conservées pour une durée illimitée. Elles doivent être conservées pendant une durée n’excédant pas celle nécessaire aux finalités pour lesquelles elles sont enregistrées.
Cependant, il peut s’avérer necessaire que le données soient conservées pendant une durée assez longue pour des raisons historiques, d’archivage ou de statistiques.
n – Principe du respect des droits des personnes concernées
En vertu de ce principe, les différents droits des personnes dont les données à caractère personnel sont traitées doivent être garanties pas le responsable de traitement.
2 – Autres principes
o – Principe de transparence (cf art.384)
Le principe de transparence implique une information obligatoire et claire ainsi qu’intelligible de la part du responsable du traitement portant sur les données à caractère personnel. Toute personne physique doit-être informée que ses données vont faire l’objet de traitement pour une finalité déterminée.
Il oblige tout responsable de traitement à fournir au stade de la collecte certaines informations à la personnes concernée.
p – Principe d’exactitude des données
Ce principe renvoie au fait que les données collectées doivent être exactes et si nécessaire, mises à jour. Toute mesure raisonnable doit être prise pour que les données inexactes ou incomplètes au regard des finalités pour lesquelles elles sont collectées et traitées ultérieurement, soient effacées ou rectifiées.
3 – Principes spécifiques relatifs au traitement des données sensibles (cf art. 394)
Parlant de données personnelles, on distingue les données qualifiées de non sensibles (dont les plus courantes sont les données alphanumériques: noms, prénoms, date, lieu de naissance, etc
L’article 394 dispose: “Le traitement de données à caractère personnel révélant l’origine raciale ou ethnique, les opinions politiques, la religion ou les croyances, l’appartenance syndicale, ainsi que le traitement des données génétiques, des données biométriques aux fins d’identifier une personne physique de manière unique, des données concernant la santé ou des données concernant la vie sexuelle ou l’orientation sexuelle d’une personne physique sont interdits”.
Toutefois, il existe des exceptions à cette interdiction :
- Données sensibles rendues publiques ;
- Données sensibles couvertes par le consentement exprès ;
- Données sensibles indispensables à la sauvegarde de la vie humaine et aux traitements de santé ;
- Données sensibles nécessaires à la défense d’un droit en justice ;
- Données sensibles utilisées à des fins statistiques ;
- Données sensibles nécessaires à l’exécution d’un contrat ;
- Données sensibles indispensables au respect d’une obligation légale ou réglementaire ;
- Données sensibles indispensables à l’exécution d’une mission d’intérêt public ;
- Données sensibles exploitées dans le cadre des activités associatives
- le traitement est nécessaire à des fins archivistiques dans l’intérêt public, à des fins de recherche scientifique ou historique ou à des fins statistiques
- le traitement est nécessaire aux fins de médecine préventive ou la médecine du travail, de diagnostics médicaux, de l’administration de soins ou de traitements soit à la personne concernée, soit à un parent, ou de la gestion de services de santé agissant dans l’intérêt de la personne concernée et le traitement est effectué sous la surveillance d’un professionnel des soins de santé.
4 – Registre de traitement et rapport annuel d’activités
i – Registe des activités de traitement
Le code du numérique fait obligation au responsable de traitement, à son représentant et au sous-traitant de tenir d’un registre des activités des traitements effectués. Les informations et les conditions de la tenue du registre sont énumérées à l’article 435 du code du numérique.
j – rapport annuel d’activités
Le code du numérique fait obligation au responsable du traitement d’établir un rapport annuel des données traitées et/ou stockées qu’il adresse annuellement à l’Autorité de Protection des Données Personnelles.
IV – Les obligations du photographe/ vidéaste, responsable de traitement
Nous allons passer en revue le comportement que doit avoir le photographe/vidéaste qui s’inscrit dans la dynamique de bien faire les choses pour se conformer à la loi.
1 – La déclaration préalable auprès de l’APDP
Cette obligation découle tout naturellement de la qualité de responsable de traitement ou de toute autre qualité en vertu de laquelle le photographe/vidéaste exerce son métier (responsable de traitement, sous-traitant, employé, etc).
En terme juridique, on parle de régime de traitement. Il peut s’agir de la déclaration mais aussi de l’autorisation lorsque le photographe prend des photos biométriques.
La formalité préalable est gratuite.
A cette fin l’APDP propose pour plus d’informations :
- de se rendre sur le site internet: https://www.apdp.bj, ou
- d’appeler le numéro de téléphone +229 69 55 00 00 ou bien
- de se rendre au siège de l’Institution sise Rue 6.076 « Aïdjèdo, Immeuble El MARZOUK Joël » 01 BP :04837 Cotonou.
2 – Observer les principes et obligations liées à la protection des données personnelles
a. Qui a accès aux données ?
Elles ne doivent être disponibles qu’aux personnes qui en ont besoin pour faire leur travail et personne d’autre ne doit y avoir accès.
i. Avez-vous un assistant ou des collaborateurs. Si oui, ont-ils besoin d’avoir accès à des données sensibles ?
ii. Travaillez vous avec un laboratoire de tirage ou de développement ? si oui, il est un sous-traitant soumis à des obligations et responsabilités spécifiques. Vous devez signer avec lui un accord de confidentialité à défaut d’engagement clairs dans ses conditions générales de prestations.
iii. Avoir une politique de confidentialité : vous devez avoir un support écrit ou un emplacement dans votre site Web où vous indiquez le consentement, la durée de stockage, l’utilisation etc. Certes, c’est un travail fastidieux, mais cela pourrait faire la différence entre la légalité et la conformité et faire face à une lourde pénalité pour non-conformité.
b. Informer les personnes concernées
Vous devez communiquer aux personnes concernées par le traitement, aux moyens de canaux de communication appropriés (cartes de visite, affiches, information via courriel/site web, etc), certaines informations obligatoires définies par le législateur à travers les dispositions de l’article 415 du code du numérique à savoir :
- preuve de la déclaration préalable du traitement ;
- données personnelles objet du traitement ;
- nature du traitement ;
- finalité du traitement ;
- délai de conservation des données personnelles ;
- partage, communication, transferts éventuels ;
- nom du Responsable du traitement ;
- modalités d’exercice des droits des personnes concernées.
Ce que l’APDP vous propose : offrir cette information pour vous. Le Qr code de votre déclaration va renvoyer sur le site web de l’APDP à un ensemble de documents :
- les mentions légales suivant le modèle mis à disposition par l’APDP (https://apdp.bj/vos-mentions-legales/);
- la politique de confidentialité suivant le modèle mis à disposition par l’APDP ;
- les conditions générales de prestation et d’exercice des droits suivant vos engagements ;
Vous exhiberez en contrepartie ostensiblement une étiquette qui portera ce Qr code. Il suffira de flasher le Qr Code pour avoir toutes ces informations.
c. Obtenir un consentement explicite :
Vous devrez vous habituer à demander le consentement explicite des clients avant de les photographier, partager ou stocker leurs images. Le traitement des données à caractère personnel n’est considéré comme légitime que si la personne concernée donne son consentement. Le traitement des données à caractère personnel relatives à un mineur est licite lorsque le mineur est âgé d’au moins seize (16) ans. Lorsque le mineur est âgé de moins de seize (16) ans, ce traitement n’est licite que si, et dans la mesure où, le consentement est donné ou autorisé par le titulaire de la responsabilité parentale à l’égard du mineur.
Si vous ne l’avez pas encore fait, pensez à utiliser des contrats Ajoutez une clause de consentement spécifique. L’APDP a mis à votre disposition un formulaire de recueil du consentement (https://apdp.bj/wp-content/uploads/2021/11/Consentement_de_collecte.pdf) Il peut être utile de demander également si vous pouvez utiliser les images.
Sous ces aspects, voyons quelques cas spécifiques :
Photos de Mariages et cérémonies :
- Il faudra un contrat précis avec le couple nuptial,
- remettez les fichiers au couple qui prend en charge l’éventuelle distribution. Vous ne serez que « sous-traitant » et vous n’êtes donc plus responsable de l’utilisation des données,
- évitez de mettre en ligne sur votre site internet ou Facebook des photos autres que celles avec le couple nuptial avec lequel vous avez un contrat.
Photos de concert ou d’évènements (sportifs p.ex.) :
- Avoir un contrat avec l’organisateur qui vous confirme avoir l’accord des « acteurs » (groupe de musique, ensemble de théâtre ou athlètes),
- Il faudra éviter des photos du public (sauf prises de derrière ou en contre-jour),
- L’organisateur pourra informer les visiteurs lors de leur réservation de place de la prise de vues et leur utilisation et demander à cette occasion leur « consentement ».
Photos en Studio avec un modèle (Shooting) :
- Avoir un contrat avec le modèle qui stipule : qui aura quoi (vous les photos pour votre site internet, exposition, concours ou autre publication et le modèle des éventuels tirages), pour combien de temps (en principe au maximum 1 à 2 ans) et où et comment sont enregistrées ces données (fichiers),
- A savoir que le modèle peut à chaque moment retirer son consentement et à ce moment vous devez effacer les fichiers.
Photos de rue (Street photography) :
- La photographie de rue est aujourd’hui considérée comme une activité artistique. Il s’agirait donc d’un « intérêt légitime » du photographe à s’exprimer (article 6, pt. f) tant que les intérêts (y compris libertés et droits) de la personne concernée prévalent. Situation peu sûre et sujet à une éventuelle appréciation cas par cas par un tribunal.
d. Stockage des données
i. Durée de stockage des données : vous devez indiquer à vos clients pendant combien de temps vous stockez leurs données personnelles – et cela inclut les images – et vous devez demander leur consentement. Vous devez avoir une durée de conservation de 1, 6 ou 20 ans et, si vous atteignez la fin de la période convenue, vous ne pouvez plus contacter vos clients pour leur demander la permission de renouvèlement. Vous devez le faire avant la fin de ces périodes.
ii. Sécurité des données : vous devez vous assurer que votre ordinateur et vos disques durs sont chiffrés et que les disques durs externes sont stockés dans un espace verrouillé. Les mots de passe doivent également être forts. Si vous le pouvez, conservez un ordinateur réservé à vos activités professionnelles et un autre pour un usage personnel.
iii. Format de stockage : l’information doit être stockée dans un format qui peut être partagé avec les clients s’ils le demandent. Si vous disposez de Microsoft, utilisez Excel, avec Apple, utilisez Numbers. Vous pouvez également utiliser Google Drive, ce qui peut être plus simple. Vos fichiers doivent être chiffrés ou protégés par mot de passe et stockés sur votre ordinateur sécurisé !
e. Partage :
si un client vous demande de ne pas partager les images ou les détails le concernant, vous n’avez pas d’autre choix que d’accepter. Cela affecte tout moyen de partage, comme le courrier électronique, les médias sociaux, l’impression, l’exposition, les concours de photographie, etc.
f. Intégrité des données :
Quelle que soit la durée de conservation, toutes les dispositions techniques, technologiques et de sécurité doivent être prise afin que les photos ou vidéos stockées demeurent fiables, exactes, qu’elles ne subissent aucune altération fortuites ou intentionnelles.
g. Droit de suppression :
si un client vous demande de supprimer toutes ses informations et les photos que vous avez prises le concernant – cela signifie que vous devez tout supprimer. Même les fichiers RAW ! Si un client vous le demande, vous devez le faire et prouver que vous l’avez fait.
3 – Avoir une politique de confidentialité sur votre site Web :
vous devez avoir un emplacement dans votre site Web où vous indiquez le consentement, la durée de stockage, l’utilisation etc. Certes, c’est un travail fastidieux, mais cela pourrait faire la différence entre la légalité et la conformité et faire face à une lourde pénalité pour non-conformité.
4. Les droits des personnes photographiées ou filmées
a – Droit d’accès
i – En quoi consiste-t-il ?
La personne dont les images sont collectées et traitées peut demander au photographe vidéaste de lui communiquer ses photos et videos. La liste des requêtes auxquelles le responsable de traitement doit accéder est prévue aux dispositions de l’article 437 du code du numérique.
ii – Comment le Responsable du Traitement remplit ce droit ?
Le photographe vidéaste garantit ce droit en indiquant aux personnes concernées, les modalités d’exercice (requête écrite, formulaire de réclamation à renseigner, courrier électronique ou postal…) dudit droit et en répondant dans le délai légal prévu par le législateur.
L’APDP tient ces modalités à disposition des personnes concernées.
b – Droit à la portabilité des données
i – En quoi consiste-t-il ?
C’est le droit d’une personne concernée de recevoir ces images, en format RAW ou autre format lisible ou utilisable, et de transmettre ces données à un autre responsable de traitement sans que le photographe / vidéaste qui a pris les images ne puisse y faire obstacle.
ii – Comment le Responsable du Traitement remplit ce droit ?
Le droit à la portabilité s’exerce dans les conditions et modalités prévues par les dispositions de l’article 438 du code du numérique (transfert électronique, remise ou tradition technique).
Le photographe ou vidéaste se conforme aux modalités prévues par la loi et l’APDP tient ces modalités à disposition des personnes concernées.
c – Droit d’opposition
i – En quoi consiste-t-il ?
C’est le droit reconnu à toute personne physique de s’opposer, à tout moment, pour des motifs légitimes, à ce que des images la concernant fassent l’objet d’un quelconque traitement. Ce droit peut consister à refuser au photographe ou vidéaste de le photographier ou de faire un traitement quelconque.
L’exercice du droit d’opposition suppose que l’on offre à la personne dont on prend l’image le droit de s’opposer, gratuitement, au traitement de son image, à toute communication ou utilisation de celle ci.
Le droit d’opposition suppose également, que la personne dont on prend l’image soit informée avant que ses images ou vidéos ne soient pour la première fois communiquées à des tiers ou utilisées pour le compte de tiers à des fins de notoriété artistique, de prospection professionnelle commerciale, caritative ou politique.
ii – Comment remplit-on ce droit ?
Le photographe ou vidéaste garantit ce droit en demandant, à la personne dont il prend l’image, si elle souhaite exercer le droit d’opposition. Il indique aussi aux personnes concernées, les modalités d’exercice (requête écrite, formulaire de réclamation à renseigner, courrier électronique ou postal…). Et conformément à l’article 440 du code du Numérique, le photographe ou vidéaste doit conserver la preuve que la personne concernée a eu la possibilité d’exercer son droit d’opposition.
Pour exercer son droit d’opposition, la personne concernée adresse une demande datée et signée, par voie postale ou électronique, au responsable du traitement ou son représentant. Le photographe ou vidéaste doit communiquer dans les trente (30) jours qui suivent la réception de la demande prévue à l’alinéa précédent, quelle suite il a donnée à la demande de la personne concernée.
d – Droit de rectification et de suppression
i – En quoi consiste-t-il ?
Toute personne physique peut exiger du photographe/vidéaste que soient, selon les cas, et dans les meilleurs délais, rectifiées, complétées, mises à jour, verrouillées ou supprimées les images la concernant, qui sont inexactes, incomplètes, équivoques, périmées, non pertinentes ou dont la collecte, l’utilisation, la communication ou la conservation est interdite.
Le droit de rectification permet de compléter des données en lien avec la finalité du traitement. Le droit de suppression permet de demander à ce que certaines données personnelles ne soient pas conservées notamment lorsqu’elles ne sont pas pertinentes, ou qu’elles ont été obtenues ou traitées en violation de la loi.
ii – Comment le photographe ou vidéaste remplit ce droit ?
Le Photographe/vidéaste permet l’exercice de ce droit en indiquant aux personnes concernées, les modalités d’exercice (requête écrite, formulaire de réclamation à renseigner, courrier électronique ou postal…) des droits.
Pour exercer son droit de rectification ou de suppression, la personne concernée adresse conformément à l’article 441 du code du numérique, une demande, par voie postale ou par voie électronique, datée et signée au photographe ou vidéaste, ou son représentant.
Dans les quarante-cinq (45) jours qui suivent la réception de la demande prévue à l’alinéa précédent, le photographe ou vidéaste met les informations à jour et communique les rectifications ou effacements des données effectués à la personne concernée.
Le photographe ou vidéaste doit également communiquer aux autres destinataires des données – par exemple aux partenaires commerciaux – les rectifications apportées. La rectification ou la suppression peut être raisonnablement difficile si une telle communication exigerait des efforts disproportionnés.
En cas de non-respect du délai de quarante (45) jours, une plainte peut être adressée à l’Autorité par la personne concernée ou ses ayants droits.
e – Droit à l’oubli (art. 443);
i – En quoi consiste-t-il ?
Il est l’obligation pour un moteur de recherche ou tout responsable du traitement qui a rendu publiques les données à caractère personnel de la personne concernée, de supprimer, le référencement ou l’indexation d’une information, des résultats affichée à la suite d’une recherche effectuée à partir du nom d’une personne, des liens vers des pages web, publiées et contenant des informations relatives à cette personne .
Qu’il s’agisse d’une photo gênante sur un site internet ou d’une information collectée par un organisme que vous jugez inutile, vous pouvez obtenir son effacement si au moins une de ces situations correspond à votre cas :
- vos données sont utilisées à des fins de prospection ;
- les données ne sont pas ou plus nécessaires au regard des objectifs pour lesquelles elles ont été initialement collectées ou traitées ;
- vous retirez votre consentement à l’utilisation de vos données ;
- vos données ont été collectées lorsque vous étiez mineur dans le cadre de la société de l’information (blog, forum, réseau social, site web…) ;
L’oubli numérique prévu par l’article 443 du Code du numérique ne peut être techniquement totalement garanti. Il est également mis en échec par l’exercice de libertés incompatibles.
ii – Comment le Responsable du Traitement remplit ce droit ?
Le photographe ou vidéaste favorise l’exercice de ce droit en indiquant aux personnes concernées, dans les Mentions Légales et la Politique de Confidentialité, les modalités d’exercice (requête écrite, formulaire de réclamation à renseigner, courrier électronique ou postal…) des droits.
L’APDP a mis à disposition des modèles à l’usage des photographes ou vidéastes, administrateurs de site web et éditeurs (https://apdp.bj/vos-mentions-legales/).
f – Droit de saisir l’Autorité de Protection des données et d’agir contre toute inaction
Toute personne concernée a le droit d’introduire une réclamation auprès de l’Autorité, si elle considère que le traitement de données à caractère personnel la concernant constitue une violation des dispositions en vigueur.
Elle a le droit de former un recours effectif devant la juridiction administrative compétente lorsque l’Autorité de Protection des Données Personnelles ne traite pas une réclamation ou ne l’informe pas dans un délai de quatre-vingt-dix (90) jours, de l’état d’avancement ou de l’issue de la réclamation qu’elle a introduite au titre de l’article précédent.
g – Droit à réparation et responsabilité (art. 451 code du numérique).
Toute personne ayant subi un dommage matériel ou moral du fait d’une violation des dispositions en vigueur sur la protection des données à caractère personnel, a le droit d’obtenir du responsable du traitement ou du sous-traitant réparation du préjudice subi.
Tout photographe ou vidéaste ayant participé au traitement est responsable du dommage causé par le traitement qui constitue une violation de la loi ou des recommandations de l’APDP. Le sous-traitant est tenu pour responsable du dommage causé par le traitement s’il n’a pas respecté les obligations qui lui incombent spécifiquement a ou qu’il a agi en-dehors des instructions licites du photographe ou vidéaste ou contrairement à celles-ci.
V – Les risques liés à la prise et/ou à la publication ou diffusion de la photographie d’une personnes physique
En tant que données personnelles, les photos ou vidéos prises par les photographes ou viodéastes sont susceptibles d’être utilisées pour la commission de nombreuses infractions au nombre desquelles on peut citer :
- l’usurpation d’identité (enregistrement des cartes SIM sous fausse identité ;
- la création de compte sur les réseaux sociaux sous fausse identité…) ;
- le chantage et rançonnement (extorsion de fonds sous menace de publication de photos dénudées) ;
- l’atteinte à la « e-réputation » : perte d’emploi ou d’opportunité suite à l’atteinte à la E-réputation d’une personne dont la photo sur sa vie privée a été auparavant exposé (photos indécentes ou vidéo prises /tournées dans des lieux prohibés…) internet ;
- l’accès aux données personnelles par des personnes non habilitées ;
- le vol de données et son utilisation à des fins illicites ;
- le montage ou la modification de la photo ou de la vidéo dans l’intention de nuire ;
- le sexe toy connecté ;
- la diffusion et/ou publication sans autorisation préalable ;
- la diffamation. etc.
Par ailleurs, il convient d’attirer l’attention des photographes/vidéastes qui sont des preneurs d’images sur certaines dispositions du code du numérique relatives à la cybercriminalité et à la cybersécurité. A ce sujet, on peut retenir les articles 515 sur la tromperie, 517 sur le traitement non autorisé, 518 à 522 sur la protection des mineurs.
A titre d’illustration, lisons ensemble les dispositions de l’article 527 pour se faire une idée des risques du métier et des obligations qu’il imposent :
Article 527 : Enregistrement d’images relatives à la commission d’infractions « est constitutif d’un acte de complicité des atteintes volontaires à l’intégrité de la personne, le fait d’enregistrer sciemment, par quelque moyen que ce soit, sur tout support que ce soit, des images relatives à la commission d’infractions.
Le fait de diffuser l’enregistrement de telles images est puni de cinq (05) ans d’emprisonnement et de vingt cinq millions (25.000.000) de francs CFA d’amende.
Le présent article n’est pas applicable lorsque l’enregistrement ou la diffusion résulte de l’exercice normal d’une profession ayant pour objet d’informer le public ou est réalisé afin de servir de preuve en justice »
VI – Sanctions en cas de non-respect des obligations légales du Responsable de traitement
La nature des griefs retenus peut entrainer comme sanction le prononcé de mesures administratives : l’avertissement, la mise en demeure de faire cesser le traitement.
Toutefois, lorsque la mise en demeure n’est pas respectée, l’Autorité peut prononcer:
- Une injonction de cesser le traitement des données à caractère personnel,
- le retrait définitif ou temporaire de l’autorisation accordée,
- le verrouillage de certaines données à caractère personnel.
Par ailleurs, les dispositions de l’article 453 du code du numérique énumèrent certaines infractions à la protection des données personnelles qu’elles qualifient de manquements graves et prévoient la possibilité de condamner l’auteur à des sanctions pécuniaires.
D’autres comportements prévus par les dispositions des articles 460, 515, 517, 518 à 522 et 257 du code du numérique sont qualifiés d’infractions pénales et sont punis de peines d’amende et d’emprisonnement.
Il convient d’ajouter qu’en sa qualité de garante de la protection des données personnelles, l’APDP dispose de pouvoirs d’investigation de contrôle. Les sanctions qu’elle est amenée à prononcer respecte le principe du contradictoire et peuvent être peuvent être déférées devant les juridictions administratives.
Conclusion
« Nul n’est sensé ignorer la loi » dit-on. Chacun de vous ici présent maitrise l’art et les techniques du métier de photographe/vidéaste. Mais quant à affirmer avec conviction la maitrise de la loi sur la protection des données personnelles, cela relève d’une gageure.
Nul n’étant au dessus de la loi, les photographes/vidéastes doivent, individuellement ou à travers leurs associations prendre toutes les dispositions pour s’approprier leurs obligations sur la protection des données personnelles et de la vie privée et les droits des personnes concernées.
Quant à l’Autorité de Protection des Données personnelles, elle reste disponible pour toutes actions d’accompagnement toutes les fois que vos associations lui en feront la demande.